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Sorcières

Catherine Prunet

Lonzée a la réputation d'avoir été un "pays de sorcières". Aux Zémont, entre Lonzée et Gembloux, se trouvait le chêne Pirard, endroit où l'on a exécuté des femmes inculpées de sorcellerie en 1637/1638. Les gens l'avaient baptisé "l'arbre des sorcières".

De la fin novembre 1637 jusqu'au 6 janvier 1638, sept femmes furent accusées de sorcellerie devant la haute cour de justice de Gembloux. Deux furent acquittées. Les autres furent exécutées : Catherine Prunet, Jeanne Michel, Anne Goffin, Anne Dumont et Marguerite Prince. Leurs biens personnels furent vendus afin de financer les procès.

Le 7 décembre 1637, la cour décida de soumettre Catherine Prunet à des méthodes radicales afin d'obtenir des aveux. On l'obligea de force à avaler une dizaine de litres d'eau froide puis chaude alternativement. Sous la douleur elle avoua être une sorcière et accepta un avocat, puis revint sur ses paroles et se dit innocente. Elle fut condamnée au supplice de la traction des quatre membres. Le 12 décembre elle fut étranglée et son corps brûlé.
Jeanne Michel fut la deuxième, on lui enfonça des aiguilles sur ses taches de naissance. Comme elle ne souffrit pas on évoqua chez elle des marques du démon faisant ressortir soit-disant sa culpabilité. Elle possédait un chapelet dépourvu de croix, on la fit avouer sous la torture, ensuite elle se rétracta. Son procès dura trois jours, elle mourut étranglée le 15 décembre.
Le lendemain se fut le procès de Marguerite Prince, elle fut exécutée le 6 janvier pour cause de la marque fatale sur sa fesse droite.
Anne Dumont et Anne Goffin furent les deux dernières a être condamnées à mort.

On était en période de guerres, de famines et de maladies, les gens étaient ignorants et la sorcellerie connaissait un succès énorme. On reconnaissait les sorcières à différents signes : porter un chapelet sans croix, posséder une tache de naissance insensible à la piqûre, faire mourir des vaches par leurs incantations, ...

La tradition dit que les sorcières se réunissaient au "tienne des six justices", endroit situé aux limites de Grand-Leez, Lonzée, Meux et Saint-Denis. C'est dans cette campagne que se trouvaient les piloris auxquels les seigneurs des environs attachaient les malfaiteurs. Les sorcières y tenaient leurs sabbats nocturnes : elles y dansaient et on pouvait percevoir leurs cris et leurs chants jusqu'à Grand-Leez.

Fin du 19ème siècle, on a donné à un tunnel, laissant passage à l'Arton, passant sous le chemin de fer, le nom de "Pont des sorcières" ; on était pourtant 2 siècles et demi après le dernier procès. Les sorcières ne sont pas oubliées lors de différentes manifestations locales comme le grand feu ou lors de reconstitutions de procès.

Lors d'un concours hippique organisé pour financer la construction de l'école, en 1962, un spectacle avait été monté et des sorcières parachutistes vinrent même délivrer l'une des leurs sur le bûcher ! En 1982 un procès de sorcellerie fut reconstitué devant la toute grande foule, dans la cour de l'ancienne abbaye d'Argenton. Il y a quelques années encore, les gardes des trains annonçaient l'arrêt en gare aux mots de "Lonzée, pays des sorcières !".

Le géant de Lonzée est une sorcière qui s'appelle Catherine Prunet. Elle défile dans les cortèges de géants de la région et c'est le seul géant penché au monde !


Source : La nouvelle commune de Gembloux ; Abbé Joseph Toussaint ; Édition de l'Orneau ; 1980
Les anciennes communautés de Lonzée, Harton et Argenton ; Remy BAUVIN ; 1997.